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24 septembre 2015 4 24 /09 /septembre /2015 10:07

Il est des rencontres étonnantes, En réagissant à un propos de Jack London (cf; article précédant, "les réveils difficiles"), je reconsidérais ma pratique et plus largement l'actualité en effleurant de quelques digressions sommaires une thèse que j'ai trouvée confirmée et développée dans le livre de Yuval Noah Harari: "Sapiens, une brève histoire de l'humanité". Son postulat est le suivant: ce qui aurait assuré la supériorité de l'Homo Sapiens sur les autres groupes humains (révolution cognitive) serait sa capacité à fédérer et organiser des groupes de plusieurs centaines ou milliers d'individus en les faisant adhérer à une même croyance, Il distingue les mythologies comme principe fondateur et moteur essentiel des civilisations. Notre réalité quotidienne serait l'effet de fictions successives, retirez la fiction et la réalité se délite pour se reconstituer selon un arsenal mythologique nouveau.

Si je définis l'art comme l'expression formelle et synthétique d'une fiction fondatrice, je pourrais réécrire une histoire de l'art en occident (sans remonter à l'antiquité) selon cette classification:

  • L'art du moyen âge, expression formelle et synthétique d'une fiction religieuse.
  • L'art de la renaissance à la révolution Française, expression formelle et synthétique d'une fiction aristocratique et monarchique.
  • L'art de la révolution Française et de la déclaration des droits de l'homme à la fin du XIXe siècle, expression formelle et synthétique d'un fiction bourgeoise.
  • L'art de la fin du XIXe aux années 1960, expression formelle et synthétique d'une fiction révolutionnaire.
  • L'art contemporain, expression formelle et synthétique d'une fiction capitaliste et libérale.

Pour l'art contemporain, si l'on envisage la révolution opérée par Marcel Duchamp, on peut imaginer que la prescience de cette thèse lui fit mettre sa cuvette de chiotte dans les musées. L'art ne peut se considérer que du point de vue du regardeur à la condition que celui-ci participe de la même fiction que l'artiste, il n'aurait donc aucune valeur intrinsèque. Ceci expliquant cela, on conçoit aisément que le "marché de l'art" survalorise des actes créatifs dérisoires au prétexte qu'ils font écho aux mythes libéraux (Koons, Murakami and so on, ceux-ci ayant d'autant plus de succès qu'ils reproduisent dans leurs pratiques un process industriel).

Je dois partager avec Yuval Noah Harari et quelques autres des gènes Néandertaliens qui nous laissent rétifs à considérer ces réalités fictionnelles autrement que pour ce qu'elles sont. Dans ces conditions, difficile d'envisager d'inscrire ma pratique dans une supposée modernité (que j'imagine d’ailleurs dorénavant obsolète). En bon pragmatique, je reviens à un artisanat scrupuleux. Puisque le hasard m'a doté d'un certain talent pour la peinture, je l'exerce avec une application qui m’attira souvent les quolibets des Hérauts tardifs de la contemporanéité.

Dans mes citations picturales (Portrait d'innocent X de Vélasquez , assomption de Nicolas Poussin), il faut voir l'hommage d'un artisan à ses prédécesseurs et l'expression d'une certaine prétention (saurais-je le faire?), peut-être aussi un message prônant un rapport pacifié au passé en faisant fi de tout superlatif inscrivant radicalement les artistes dans les fictions que leurs sujets véhiculent.

Je dédie ce court et dernier chapitre à Eugène qui se posa la question "mais pourquoi a-t-il fait ça?".

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